L’édition 2016 du OuiShareFest qui avait pris ses quartiers dans la capitale parisienne avait pour thème « La ruée vers l’or ». Sur fond de climat d’indignation, les axes principaux étaient centrés autour des valeurs humaines qui nourrissent les modèles d’épanouissement (confiance, bonheur, responsabilité), des grands enjeux sociétaux (la ville de demain, les migrants…) et des alternatives concrètes pour construire le futur et agir ensemble.
Fin de l’utopie.
Il y a 5 ans l’économie collaborative était considérée comme le meilleur mouvement pour changer le monde. Beaucoup d’entrepreneurs ont ainsi fait le pari risqué de l’économie collaborative, fuyant un système dans lequel ils s’enlisaient. Pour les idéalistes, ce fut la promesse d’un monde meilleur.
Jusqu’ici « la ruée vers l’or » n’était rentable que pour une faible majorité qui profitait de l’abondance de valeurs créées par les communautés. Aujourd’hui, les enjeux sont cruciaux : instaurer et faire valoir des valeurs humaines coopératives pour faire subsister les nouveaux modes collaboratifs et faire face aux défis de demain (migration, environnement, surpopulation dans les villes).
Open City et citoyenneté
Le phénomène Open city a donné lieu à la reconnaissance du citoyen en tant que contributeur et membre actif dans la conception et l’évolution des villes.
A Bristol, illustration parfaite de la « cité contributive », divers groupes de résidents, artistes, techniciens, décideurs et militants se sont formés autour de différentes problématiques : l’humidité au sein des foyers à usage privé, prédire le flux des clients dans les commerces locaux pour venir en aide aux commerçants indépendants ou encore la biodiversité des parcs et espaces verts afin de mettre en avant la santé de l’écosystème local et de le protéger à court et moyen terme.
Une rupture du schéma traditionnel est en marche, la construction pyramidale des organisations doit se renouveler.
De nouveaux systèmes ont été introduits dans de nombreuses villes en vue d’optimiser les ressources disponibles. San Francisco en est la quintessence, elle a donné naissance à sa propre société de transport public comme les sociétés de covoiturage. Une partie non négligeable du CA est prélevé en fin d’année dans le but de réguler l’intérêt commun.
Une plus faible densité du trafic, une gestion optimale du partage de lieux privés dans les villes à grande échelle sont les enjeux majeurs de cette nouvelle façon de penser l’urbanisme. Elle ne pourra se faire sans l’équilibrage du partage de valeurs et une collaboration sans faille entre citoyens et institutionnels.
Zero déchet la responsabilité citoyenne
L’autre enjeu majeur reste l’environnement, de la crise des déchets à une pénurie de ressources, l’étau se resserre à vitesse grand V. Avant que celle-ci ne soit effective et entraine une demande d’énergie en constante croissance, de nombreuses initiatives citoyennes ne cessent de se multiplier autour de cette problématique.
L’association Zero Waste qui se définit pionnière du mouvement Zéro déchet, a d’ores et déjà permis à certaines collectivités de réduire de 80 % le volume de déchets résiduels, en optimisant le recyclage et la valorisation organique. La commune toscane de Capannori en est l’illustration parfaite où la mobilisation de ses quelques 46 000 citoyens a permis un changement sans précédent.
Ces activités ont entraîné la création d’emplois locaux et le réemploi, sans surcoût pour la collectivité d’une part et ont impactées les mentalités d’autre part. La collaboration a également commencé à San Francisco par le biais de groupes de ramasseurs de déchets qui sont désormais employés dans de multiples sociétés da la ville.
Capitaliser sur l’économie collaborative
A Medellin, comme dans le reste de la Colombie, la pauvreté a reculé au début des années 2000.
La prise d’initiatives collectives et la politique de développement durable ont fortement dynamisé la culture urbaine et changé les mentalités. Lutter contre les violences quotidiennes, accéder plus aisément aux soins médicaux et favoriser l’intégration sociale sont devenus des actes de normalité.
Medellin qui a toujours bénéficié d’un réel dynamisme économique, y compris pendant les heures les plus sombres de son histoire, commence désormais à valoriser ce potentiel dans une perspective de contribution à l’amélioration des conditions de vie et de renforcement de la cohésion sociale. La contribution citoyenne s’impose comme moteur d’innovation sociale, écologique et économique.
L’exemple de 4 initiatives issues de la mobilité partagée, civic tech & foodtech
OuiHop est un service d’autostop connecté de courtes distances lancé par Franck Rougeau, reposant sur un modèle économique d’avantages en nature et non sur le traditionnel paiement entre particuliers.
Citizenlab est un mouvement social et politique. L’ambition de Citizenlab est de faire émerger une nouvelle économie qui intègrerait le plus grand nombre d’acteurs via une plateforme d’engagement civique.
Petitbus est une application qui aide les parents à s’organiser entre eux pour accompagner leurs enfants à l’école. Créée par Thomas Cazade, qui prône la collaboration d’énergies, a pour ambition la création d’une communauté locale active et influente.
Shapeat un réseau collaboratif sur la Food impression 3D spécialisé dans la création de recettes culinaires . La cuisine dite impression 3D a le potentiel de révolutionner la créativité et la durabilité de nos aliments.
En bref, qu’en est-il de la responsabilité des institutions ?
Selon Enzio Manzini, « nous sommes à la croisée de deux trajectoires de rationalisation de l’économie collaborative : les modèles néolibéraux renouvelés et la normalisation constructive des modèles disruptifs ».
Une rupture du schéma traditionnel est en marche, la construction pyramidale des organisations doit se renouveler, la digitalisation a entrainé une rupture notamment grâce aux échanges transversaux qu’elle a créée. Les institutions doivent encourager et protéger les valeurs de collaboration, redéfinir leurs caractéristiques et intégrer les technologies numériques pour se rapprocher des citoyens.
Les organisations ont de moins en moins le monopole sur les organisations collectives, il est, par conséquent, primordial d’accéder à une transition et réflexion autour de l’émergence de ces nouveaux systèmes de penser la vie en société. La révolution est en marche, les initiatives des startups ont permis l’acceptation de la transformation de nos sociétés, ce changement prendra du temps mais la révolution industrielle ne s’est-elle pas concrétisée en 180 ans ?
Marie-Astrid de Cazanove, a quitté son poste au sein du siège du Groupe Danone pour se lancer dans l’économie collaborative et l’entrepreneuriat en montant Gogomitch, la 1ère communauté d’objets pressés.