#Innovation : Quel futur pour les emojis ?

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Si le mot « Emojis » est l’un des nouveaux venus en 2017 dans les dictionnaires Robert et Larousse, ce n’est pas vraiment un hasard. Du japonais “e“ (image) et “moji“ (lettre), ils ont été inventés dans les années 90 par Shigetaka Kurita pour la rme de télécoms NTT Docomo. Mais c’est à partir de 2011 et leur intégration dans l’iOS d’Apple, que ces petits visages jaunes ont réellement pris possession de notre vie numérique. À la fois intimes, drôles ou créatifs, les emojis permettent d’intégrer de l’émotion et des symboles dans les messages. Près de 6 milliards d’emojis sont échangés tous les jours, un chiffre qui donne le tournis au point que certains les considèrent déjà comme un langage unique et universel, alors que d’autres s’inquiètent de leur utilisation au détriment des mots. Entre émotion, outil de communication et organisation quasi secrète, WTF Emoji ?

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Article paru dans Wydden Magazine, le magazine papier de 1001startups


Qui ne s’est pas retrouvé devant un message en se demandant s’il faisait une bonne interprétation de son contenu ? La communication non verbale est primordiale dans les échanges en face à face ; la gestuelle, l’attitude et les expressions du visage en disent long sur une personne et ses intentions. Selon le psychologue Albert Mehrabian, 93% de la communication serait même constituée de non verbal, les mots ne représentant alors que 7% du sens global. Le digital permet aujourd’hui de rentrer en contact et de communiquer instantanément avec n’importe qui, n’importe quand. Pourtant, il nous prive de l’ensemble de la communication non verbale qui permet souvent de compléter son message.

UN OUTIL DE COMMUNICATION NON VERBALE

« Les émoticônes sont nées en même temps que les premiers chats dans les années 70, sous forme de pictogrammes dessinés, très pixelisés. Dans les années 80 sont apparues les émoticônes constituées de signes typographiques, suivies, peu après, des fameux petits visages jaunes. Les emojis, eux, sont apparus au Japon dans les années 2000. Tous ces signes ont été inventés pour remplacer les mimiques du visage comme les sourires, les gestes du corps dans les échanges en face à face. Ce mode de communication touche plus particulièrement les 10-40 ans, les générations qui ont grandi avec Internet » nous explique Pierre Halté, docteur en Science du langage, qui étudie principalement les émoticônes. Les émoticônes permettent donc avant tout de répondre au besoin humain d’introduire de l’émotion dans la communication. Depuis que leur cote de popularité a explosé, ils remplacent peu à peu les LOL, MDR ou les hashtags détournés qui servaient jusqu’alors à définir un contexte. « Pour ma part, je distingue bien les émoticônes des emojis. Les émoticônes représentent des visages qui expriment des émotions et qui permettent d’ajouter les éléments de communication non verbale aux messages. Les emojis font partie d’une banque de pictogrammes, destinée à la téléphonie mobile à l’origine, constituée d’émoticônes et de pictogrammes représentant simplement des objets » complète-t-il. Les raisons de leur utilisation peuvent être diverses. Ils peuvent renforcer un message (Trop cool !? ), expliciter un contenu (Tu es con !? ) et parfois même remplacer du texte (Il est ? ). Contrairement aux idées reçues, les emojis ne sont pas seulement réservés aux plus jeunes. Selon une étude réalisée par Emogi, 92% de la population online utiliserait les emojis afin d’exprimer plus facilement ses ressentis et ses états d’esprit que l’usage seul des mots. Instagram annonce même que 50% des légendes des photos publiées par les Français sur sa plateforme sont composées d’emojis. Bien loin d’être un effet de mode, l’émoji est une lame de fond bien ancrée dans la communication digitale : « Il s’agit en réalité plus d’une révolution des moyens de communication que d’une révolution des émoticônes ! » affirme Pierre Halté. Que les « emoji-sceptiques » se rassurent ! Ce nouveau langage ne remplacera pas les mots : « Le langage vit et évolue depuis tout temps. La première forme d’écriture était déjà pictographique ; les hiéroglyphes, par exemple, n’ont pas empêché la création d’une forme d’écriture plus élaborée. L’origine historique de l’écriture et des lettres de notre alphabet est pictographique. Les écritures pictographiques ont disparu au cours du temps pour être remplacées par des écritures associant des graphies et des sons car les seuls pictogrammes permettent moins de combinaisons. Tout comme les expressions et les gestes ne remplacent pas les mots, les emojis ne remplaceront pas non plus l’écrit mais continueront d’agir comme un complément du langage. Les émoticônes et les énoncés verbaux fonctionnent ensemble comme les gestes et la parole. D’ailleurs des études ont au contraire mis en avant que les personnes les plus compétentes dans leur communication maitrisent plusieurs codes plutôt que l’utilisation standard de la langue. »

exemple communication emoji

UN LANGAGE VRAIMENT UNIVERSEL ?

Si les emojis semblent s’imposer comme un langage universel compréhensible par tous, dépassant les barrières de la langue, certaines mauvaises interprétations peuvent toutefois être faites. Comme dans toute communication, les différences culturelles peuvent générer des confusions et la signification d’un emoji peut parfois varier en fonction du pays dans lequel on vit. Si dans le monde occidental l’émoji « pouce levé » est généralement associé à un message positif, il devient une insulte gestuelle au Moyen-Orient. L’emoji « au revoir » quant à lui est interprété en Chine comme un au revoir définitif. Au-delà des significations, l’usage des emojis est aussi très différent selon les pays. Ainsi, la France est le seul pays au monde où le cœur est plus utilisé que le smiley (le romantisme français? ), les Australiens affectionnent particulièrement ceux représentant la drogue et l’alcool?  , les Brésiliens plutôt les signes religieux et les Espagnols ceux de la fête. « Comme le langage et les expressions, les emojis sont communautaires. Au-delà même des spécificités culturelles par pays, les sous-communautés vont également donner des sens bien précis à certains emojis. L’aubergine en est le meilleur exemple. Utilisé initialement sous instagram comme symbole phallique, il a ensuite été interdit et supprimé par le réseau social. Le buzz suscité autour de cette interdiction a fait décoller sa popularité et il est aujourd’hui utilisé sur l’ensemble des communications online.
Pour autant votre mère pourrait très bien vous envoyer cet emoji lorsqu’elle fait une moussaka, sans se douter un seul instant de l’interprétation que vous pourriez en faire » poursuit Pierre Halté. Pour compliquer encore un peu les choses, les différences existant entre les systèmes d’exploitation peuvent également être source de confusion. Selon une récente étude de l’Université du Minnesota, l’utilisation d’Emojis peut parfois dégrader la communication en créant des malentendus. Ainsi, selon le système d’exploitation de votre interlocuteur, le sens de votre émotion peut être mal interprété. Pour avoir une vision complète, l’encyclopédie Emojipedia décline l’ensemble des emojis dans chaque système utilisé. « Ce qui séduit les gens, c’est d’avoir justement une uniformité et une base de communication stable. C’est la raison pour laquelle certaines plateformes comme Whatsapp ou Facebook disposent de leur propre système d’emojis, pour ne pas générer de malentendus, » complète Pierre Halté.

LES STARS ET LES EMOJIS

Les stars ne sont généralement pas les dernières à surfer sur les tendances. Et les emojis ne sont pas une exception ! Fin 2015, les Kimojis, les emojis de Kim Kardashian (1) ont créé un véritable buzz. En vendant sur les stores des emojis à son image, elle a réalisé une opération très lucrative. La businesswoman aurait gagné jusqu’à un million de dollars par minute sur le mois de décembre 2015 et aurait ainsi bloqué l’Apple store en raison d’une trop forte demande. En France c’est Booba qui, un an après, en décembre 2016, a repris le concept avec ses Emojizi, vendus 1.99€. Nabilla, Amber Rose, Justin Beiber ou encore Charly Sheen ont également suivi la tendance. Katie Perry a quant à elle utilisé les emojis pour retranscrire intégralement sa chanson « Roar » dans un clip bonus (2). Mais bien au-delà du show-business, le phénomène emoji conquiert petit à petit toutes les personnalités. Même les politiques s’y sont mis, puisque Hillary Clinton a sorti sa gamme d’emojis dans le cadre de sa campagne présidentielle. Voulant engager le dialogue avec les plus jeunes, la candidate démocrate a tenté une communication à base d’emoji en demandant aux étudiants : « comment vous sentez-vous vis-à-vis de votre prêt étudiant? Répondez en 3 emoji enjeux societauxemojis ou moins ». Ce message n’a pas convaincu sa cible et la candidate s’est fait violemment « clasher » sur Twitter. Pour autant, doit-on en conclure que les emojis doivent se cantonner aux messages funs ? « Ce n’est pas parce que les emojis sont tendance que toutes les communications qui sont faites en les utilisant vont l’être. C’est une forme de communication comme une autre, comme le langage, on peut en faire bon usage comme être « démago » ou totalement « has been » » analyse Pierre Halté. Et cela, les marques l’ont bien compris.

LES MARQUES ET LES EMOJIS

Nommés brand stickers ou émoticônes de marque, les emojis créés par les marques à leurs effigies sont aujourd’hui devenus monnaie courante pour communiquer auprès d’une cible jeune, moins sensible aux canaux de communication traditionnels. En créant un échange plus informel et souvent plus axé sur l’émotion, toutes les marques, même celles de luxe, sortent leurs emojis « brandés* ». Ainsi, Versace ou encore Guerlain pour la petite robe noire ont créé leurs propres emojis et Acne, la marque de mode, a lancé une collection de prêt-à- porter déclinant les petits visages jaunes. Mais au-delà de simples emojis à télécharger, certaines marques déclinent les emojis dans leur communication globale. Ainsi, Coca-Cola est la toute première marque à s’être positionnée sur les emojis, en intégrant des « emoticokes » à partager sur le réseau social Twitter avec le #sharecoke (4). La marque a depuis réalisé de nombreuses opérations inédites dans différents pays. Dans le métro suédois, par exemple, la marque a installé un système de reconnaissance faciale sur un panneau d’affichage, affichant en live l’émoticône correspondant à l’expression de la personne se trouvant devant. La marque Durex a quant à elle lancé une campagne pour un préservatif au goût aubergine (3). Les codes des emojis sont ici maitrisés avec brio et humour et permettent à Durex de renforcer son image auprès des plus jeunes, cœur de sa cible de clientèle. Mais avec son air de ne pas y toucher, Durex dépasse ici le cadre de la communication. En créant le buzz avec son préservatif goût aubergine, la marque mène en parallèle une véritable campagne de lobby social en demandant l’ajout de l’emoji « préservatif » aux claviers de nos téléphones. Une pierre deux coups ! D’autant plus que le préservatif au goût aubergine était un fake qui ne verra finalement jamais le jour. Certaines marques vont plus loin dans leur communication. En adressant des messages totalement codés en emojis, l’objectif est de créer un lien avec la nouvelle génération. Ainsi l’Oréal a lancé sur Twitter une offre d’emploi en emojis… en remplaçant totalement les mots par des pictogrammes (5). La marque a souhaité montrer qu’elle comprenait et parlait comme les jeunes. Il va de soi que même en maitrisant les emojis, la traduction n’est pas évidente ! Mais les emojis peuvent aussi se mettre au service de bonnes causes et d’associations ! En jouant sur l’émotion et en s’adressant à une génération sensible à ce langage, certaines associations ont démontré leur volonté d’adapter leur communication à un nouveau public. Aux États-Unis, pour ouvrir les yeux des citoyens sur ce phénomène, l’association Médecins Sans Frontières a imaginé des emojis qui vous permettent de contribuer à la cause des réfugiés. WWF a sensibilisé l’opinion publique sur la disparition de certaines espèces animales en créant 17 emojis d’animaux menacés. Une opération de communication menée en complément d’une campagne de micro-dons pour la cause animale. L’association suédoise BRIS qui lutte contre les violences domestiques faites aux enfants a lancé des émojis représentant des situations de souffrance et de maltraitance que l’enfant rencontre (6). Dans le vote des nouveaux emojis, le ministère des Affaires religieuses d’Oman a le même poids qu’Apple, Microsoft etc… ça laisse perplexe.

emoji business brand

L’AVENIR DES EMOJIS SE JOUE DANS LA SILICON VALLEY

Si dans leur utilisation les emojis sont légers et amusants, leur ajout à la liste des emojis officiels, approuvé par le très sérieux standard Unicode, est complexe. Des emojis aux appartenances religieuses, à ceux représentant la diversité et la place de la femme dans la société, les emojis portent en réalité des enjeux sociétaux de premier ordre. Le consortium Unicode est l’organisation, plutôt secrète, qui est en charge de décider quels sont les symboles qui seront demain sur vos claviers. Depuis plus de 25 ans, cette association qui code les écritures du monde, s’attache à créer une similarité visuelle sur les supports numériques. Au rythme de quatre fois par an, les réunions du Consortium ont lieu dans la Silicon Valley et sont, tour à tour, hébergées par IBM, Apple, Adobe, Microsoft etc. Et si l’on retrouve logiquement parmi les membres permanents la plupart des entreprises de technologie qui cherchent à garder une certaine maîtrise de l’évolution de ces caractères échangés sur leurs plateformes, la présence de certains membres laisse perplexe. Ainsi, le ministère des Affaires religieuses d’Oman, les gouvernements d’Inde et du Bangladesh sont dotés du poids électoral le plus élevé. Votés en 2016, la girafe, le bretzel ou encore une mère allaitante seront bientôt ajoutés au référentiel Unicode 10. Également, de nouveaux emojis permettant une meilleure représentation de la femme dans sa vie professionnelle (enseignant, médecin…) viendront compléter les réductrices icônes de princesse représentant jusqu’alors les femmes. Mais avant de se retrouver sur vos claviers, les emojis doivent convaincre de leur utilité et chaque nouvelle demande ressemble à un véritable parcours du combattant. Jusqu’à deux ans peuvent s’écouler entre le dépôt d’une demande d’emoji et son intégration dans nos smartphones. Un dossier conséquent doit accompagner chaque demande et justifier son bien- fondé : histoire, origine, croquis et surtout apporter la preuve que ses attaches culturelles sont suffisamment larges et diffuses, par exemple des symboles représentant la culture chinoise.

QUEL FUTUR POUR LES EMOJIS ?

En juillet 2016, la société canadienne Bitstrip qui propose la création de son propre avatar virtuel à travers ses « bitmojis » a été rachetée 100 millions de dollars par Snapchat. Bien loin d’être une acquisition effectuée sur un coup de tête, ce rachat démontre la compétition que les plateformes se livrent dans la guerre aux emojis personnalisés. Pour rester dans la course, Facebook a déposé le 3 mai 2016 un brevet lui permettant de transformer automatiquement les raccourcis clavier en emojis personnalisés. Pour y parvenir, la plateforme utiliserait les technologies de machine learning qui transposeraient automatiquement des photos de profil en emoji. Les géants de la Silicon Valley innovent toujours plus et consacrent des moyens considérables pour être en mesure de créer des emojis toujours plus ressemblants aux utilisateurs, GoDaddy propose des noms de domaines en emoji. L’extension .ws, à l’origine destinée aux îles Samoa, est la seule aujourd’hui permettant l’utilisation de caractères spéciaux. Mais peut-être à l’avenir les emojis s’imposeront-ils sur l’ensemble des extensions ? Les chatbots seront aussi au cœur du futur des emojis. Les sociétés de services travaillent quant à elles sur des mécanismes permettant de déclencher automatiquement une action suite à l’envoi d’un emoji. Ainsi, vous pourrez bientôt commander par exemple une pizza, une paire de chaussures ou une musique en envoyant un simple emoji. Preuve que l’industrie du sexe est toujours à la pointe de l’innovation, les clients américains de PornHub peuvent dès à présent commander un film porno en envoyant l’emoji adapté par SMS.

Tous propos recueillis par GO, sauf mentions.

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