Manger est un besoin physiologique et une préoccupation universelle. Et les startups l’ont bien compris : l’agriculture, la distribution, la préparation, la gestion des déchets… les innovations sont nombreuses pour répondre à l’enjeu de nourrir les hommes, toujours plus nombreux, dans des conditions climatiques toujours plus difficiles. Les technologies prennent aujourd’hui part aux enjeux alimentaires. De la nutrition génomique à la blockchain, en passant par la robotisation et l’agriculture drivée par les datas découvrez quelques-unes des innovations technologiques qui s’imposent peu à peu dans nos assiettes.
Blockchain et Traçabilité
L’origine des aliments et leur traçabilité sont devenues une préoccupation principale pour les consommateurs. L’émergence des OGM et l’accord CETA ont développé la méfiance, et l’augmentation des intolérances (sans lactose, sans gluten) et des idéaux alimentaires (flexitarien, végétarien, vegan) ont renforcé le besoin du consommateur de savoir ce qu’il ingère. Dans ce contexte, les startups qui proposent des solutions pour suivre les aliments de l’agriculteur au consommateur ont fait leurs apparitions. Kakaxi, une solution complète qui mixe un capteur à une plateforme web, permet à la fois au consommateur de voir pousser ses légumes et à l’agriculteur de suivre son produit jusqu’à l’assiette du consommateur. Les scanners alimentaires représentent également un gros potentiel, tant pour tracer la fraîcheur, l’origine et les phytos présents sur des produits bruts, que pour détecter le nombre de calories, les ingrédients et les apports en nutriments des assiettes. Tellspec est un petit boitier qui réalise une analyse moléculaire des aliments. En scannant l’aliment, les informations comme le taux de protéine, de graisse et de glucide sont remontés au consommateur sur une application mobile.
Les expérimentations permettent de déterminer le meilleur environnement de production pour chaque variété et de le reproduire à l’identique, peu importe l’endroit où l’on se trouve sur la planète.
La blockchain est une technologie qui représente de gros enjeux pour le secteur de l’alimentation. En certifiant l’ensemble des étapes de la supplychain de l’agriculteur au consommateur, en passant par les industriels et les distributeurs, la blockchain permet de tracer l’origine et le cycle d’un produit. Il s’agit, pour l’ensemble des acteurs de la chaîne, d’inscrire dans une blockchain chaque étape du processus de fabrication d’un produit alimentaire, depuis sa production jusqu’à son lieu de vente. Côté distributeur, la certification de la traçabilité permettrait de réduire les risques sanitaires et les scandales alimentaires, comme ceux de la vache folle, la viande de cheval ou encore plus récemment les œufs contaminés. Pour le consommateur, la technologie étant réputée comme incorruptible et inaliénable, elle permet d’assurer la transparence totale sur les étiquettes. Ainsi, de nombreuses entreprises, petites ou grandes travaillent désormais sur la blockchain afin de rendre la chaine alimentaire plus sûre. C’est notamment le cas d’IBM qui mène actuellement des projets pilotes avec des industriels comme Nestlé ou des distributeurs comme Walmart.
Côté startup française, Connecting Food se positionne sur la certification en temps réel des produits au cours de leur acheminement, tout au long de la supply chain, permettant de maintenir le respect des certifications et labels agroalimentaires. La startup anglaise Provenance travaille quant à elle sur la traçabilité des matières premières, avec pour première expérimentation la pêche du thon en Indonésie.
InVivo, groupe coopératif représentant la moitié des agriculteurs français propose InVivo Quest, son programme de détection des innovations françaises de l'agriculture et de l'alimentation.
Agriculture des données
Bien loin des idées reçues, les agriculteurs constituent une profession très connectée. Selon le rapport agriculture-innovation 2025, diligenté par le ministère de l’Agriculture, 79 % des agriculteurs utilisent internet et 70 % sont utilisateurs d’app. Jusqu’ici, les connaissances des agriculteurs pour leurs terres et leurs cultures se limitaient à leurs expériences. Avec les nouvelles technologies, les agriculteurs ont désormais la possibilité de s’équiper d’images, de sondes et de capteurs qui produisent de nombreuses données, lesquelles peuvent ensuite être exploitées pour driver les exploitations : semences, engrais, traitement, quantité d’eau… Le big data est entré dans l’agriculture et permet d’y apporter plus de précision, tout en réduisant les coûs et les impacts écologiques.
SMAG est la société française de référence de la smart agriculture. SMAG offre aux agriculteurs un ensemble de solutions permettant d'optimiser la gestion et le pilotage des exploitations. Les informations sont ainsi centralisées et permettent une valorisation technique, économique et réglementaire grâce à des outils pratiques et exploitables directement par les agriculteurs.
Sencrop est une station agro météo française, qui permet aux agriculteurs de collecter les éléments tels que la pluviométrie, l’hygrométrie, la vitesse du vent, la température… Toutes les quinze minutes, les informations relevées par la station sont envoyées directement à l'agriculteur, sur son smartphone. Ces données hyper localisées permettent alors à l’agriculteur d’adapter l’irrigation, l’apport d’engrais et les bons moments pour ses récoltes.
L’université de Sydney en Australie a développé Shrimp, un robot capable de ramener 20 à 150 vaches jusqu’à l’étable.
FarmLogs est une startup américaine éditant une application mobile qui permet de surveiller et de cartographier les champs avant et pendant la récolte. Les informations collectées sont à la fois issues de données météo publiques, d’images satellites et de données renseignées par les agriculteurs. En utilisant le machine learning, la startup analyse et transforme ces datas en données exploitables directement par les agriculteurs.
Hydroponie, aéroponie et aquaponie
L’agriculture hors sol s’impose de plus en plus comme le nouveau mode de production agricole des villes.Les nouvelles technologies permettent désormais de développer les techniques d’hydroponie et d’aéroponie, que l'on considère comme une sorte d'agriculture numérique.
OpenAG est une initiative lancée par le laboratoire open agriculture initiative du MIT qui a pour objectif de recréer les environnements de production idéaux grâce aux technologies. C’est ce que l'on appelle le "food computer" dans la mesure où toutes les datas sont programmées : température, luminosité, humidité, etc. Les expérimentations permettent de déterminer le meilleur environnement de production pour chaque variété et de le reproduire à l’identique, peu importe l’endroit où l’on se trouve sur la planète. La poussée est 4 à 5 fois plus rapide et permet une réduction d’eau de 70%.
AeroFarms est une startup américaine créée en 2004 qui développe des cultures en aéroponie, c’est-à-dire que les plantes poussent sans contact avec un milieu solide ou liquide, dans un brouillard nutritif. Depuis sa création, la startup a développé des algorithmes de croissance pour 250 variétés de légumes verts. Chaque production est l’occasion de recueillir des milliers de données informatiques, et d’optimiser le protocole. Agricool est une startup qui cultive en plein Paris des fraises dans des containers. Sans pesticides ni OGM et en utilisant 100 % d’énergie renouvelable et 90 % moins d’eau que l’agriculture conventionnelle, la startup souhaite bouleverser l’alimentation des urbains. Après la production de fraises, Agricool travaille sur la production d’autres végétaux. Agripolis est une startup qui installe et exploite des fermes de production en aéroponie sur des surfaces extérieures et intérieures inexploitées, sous forme de prestation ou d'exploitation d'espace contre rétribution. La startup Berlinoise ECF développe une agriculture urbaine qui allie pisciculture et culture maraîchère. Reposant sur le principe d’aquaponie, les poissons qui sont en bas produisent de l’engrais pour les plantations sur l’étage supérieur, plantées dans du sable ou de la roche. En créant un écosystème fertile sans terre, cette technologie permet de produire plus facilement en ville.
Drone et Robotisation
Airinov est une startup française qui propose aux agriculteurs des vols de drones agricoles permettant de cartographier les cultures. Avec les images récupérées et analysées par la startup, l’agriculteur peut alors identifier les écarts de besoins au cœur d’une même parcelle et ainsi ajuster précisément les intrants. Naïo est un fabricant français de robots agricoles notamment pour le maraîchage et la vigne. Oz, son petit robot de binage et désherbage est l’un des robots agricoles les plus populaires. L’université de Sydney en Australie a développé Shrimp, un robot capable de ramener 20 à 150 vaches jusqu’à l’étable, à la manière des bergers Australiens.
Nutrition et génomique
Chaque personne a des capacités d’absorption et des besoins différents en fonction de sa génétique. Selon la nutrigénomique, notre régime alimentaire a des impacts importants sur notre fonction génomique, et les interactions entre génome et alimentation pourraient améliorer la compréhension et la prévention de certaines maladies comme par exemple le diabète ou l’obésité. La nutrition génomique permet de créer une alimentation personnalisée en fonction de son génome et de son propre organisme. Si en France, ce type de nutrition est freiné par l’interdiction de commercialisation de tests ADN à grande échelle, de nombreux projets émergent aux États-unis, en Inde ou en Chine, qui sont moins regardants sur les règles éthiques de la génétique. La startup US Habit, qui a déjà levé plusieurs dizaines de millions de dollars, propose un kit à moins de 300$, qui permet à partir d’un échantillon d’ADN et de sang d’obtenir un bilan diététique. D’autres sociétés, comme ORIG3N, commercialisent des tests semblables.
En France, la startup Bloomizon commercialise des programmes de santé personnalisés d’apport en vitamine, en fonction des carences propres à chacun. La startup modélise votre nutrinome et fabrique, en fonction, les vitamines qui apporteront à votre corps les quantités exactes de nutriments nécessaires.
L'alimentation de demain est déjà dans nos assiettes. Les nouvelles technologies apportent des réponses toujours plus concrètes aux problématiques et aux besoins de consommateurs toujours plus exigeants et pressés. Dans la silicon Valley, les repas à boire s'imposent peu a peu comme la solution pour manger sain et vite. Toujours plus facile, toujours plus rapide, toujours plus healthy... l'enjeu de demain sera peut être de maintenir le plaisir du temps. Le plaisir de voir pousser, de déguster et de se retrouver!