Entre 2000 et 2013, Frédéric Krebs a participé à l’aventure d’AlloCiné, notamment en tant que Directeur Général. Passé ensuite par Gaumont Pathé et le pilotage de lancements des films du studio américain 20th Century Fox tels The Revenant ou Deadpool, il reste connecté à l’écosystème startup français en devenant souscripteur du fonds d’investissement Newfund. Aujourd’hui opérationnel dans ce fonds, Frédéric a accepté de revenir avec nous sur l’évolution du modèle des fonds et la réputation de Newfund dans l’écosystème.
Peux-tu nous présenter le modèle de Newfund ?
Frédéric Krebs : Newfund est un fonds d’investissement early-stage qui investit des tickets moyens entre 500 000 et 2 millions d’euros dans des startups en France et aux Etats Unis. Nous investissons souvent dans des projets atypiques et restons volontairement à l’écart des grandes tendances, notamment lorsque les valorisations ne nous semblent pas justifiées. Notre modèle, en tant que fonds, est de gérer l’argent de nos souscripteurs, qui nous confient une partie de leur patrimoine et attendent une performance économique.
La performance du fonds dépend du succès des entreprises dans lesquelles nous investissons et aussi des conditions de ces investissements. Pour maintenir notre modèle, nous devons donc entrer au prix « juste ». Selon nous, lorsque les valorisations explosent sur certains secteurs, c’est presque déjà trop tard pour y investir… Par exemple, nos plus belles opérations d’investissement étaient très en avance sur leur marché, comme la société Medtech dans laquelle nous avions investi en 2010. (ndlr L’Américain Zimmer Biomet a racheté Medtech pour 164 M€ en 2016)
Dans l’écosystème, Newfund souffre parfois d’une mauvaise réputation. Comment expliquer cela ?
Lorsque je suis arrivé chez Newfund, je recherchais un nouveau défi professionnel. Je connaissais François Véron depuis notre rencontre chez AlloCiné et je suis devenu souscripteur du fonds à titre personnel dès 2008. J’en ai toujours eu une image positive comme souscripteur.
J’ai cherché à comprendre d’où provenait ce déficit d’image et comment nous pouvions changer les choses, tant d’un point de vue interne qu’externe.
Avant de rejoindre l’équipe de Newfund de manière opérationnelle, j’ai engagé le dialogue avec la plupart des acteurs de l’écosystème et je me suis rendu compte que ce que faisait Newfund n’était pas toujours perçu de manière juste, il y avait un écart entre la qualité du travail accompli et la perception externe. J’ai cherché à comprendre d’où provenait ce déficit d’image et comment nous pouvions changer les choses, tant d’un point de vue interne qu’externe.
Comment tentez-vous de changer cette perception ?
L’écosystème a radicalement évolué ces dernières années et Newfund, comme l’ensemble des fonds d’investissement existant depuis plusieurs années, a dû prendre la mesure des changements en cours pour mieux répondre aux besoins des entrepreneurs. Les fonds disponibles sont abondants et les investisseurs se livrent une véritable concurrence sur les bons dossiers, qui trouvent plus facilement les financements nécessaires. Pour autant, il est important de ne pas tomber dans la complaisance car c’est toujours compliqué de construire une vraie entreprise qui trouve le succès.
Le rapport de forces entre fonds et entrepreneurs se rééquilibre, ce qui est très sain. Mais comme tout changement structurel, il doit être accompagné d’un changement culturel et c’est ce que nous menons actuellement avec Newfund. Mon arrivée coïncide avec la volonté du fonds et de François Véron d’apporter encore plus de valeur aux entrepreneurs, notamment dans les dimensions du développement marketing et international.
[wydden_refer_post post= »30452″][/wydden_refer_post]Nous avons changé notre manière de travailler en interne aussi, pour être plus efficaces. Nous sommes plus actifs dans l’accompagnement des entrepreneurs pour tenir un vrai rôle de partenaire, car il est indispensable d’aligner les objectifs entre les investisseurs et les entrepreneurs. En ce sens, j’observe avec beaucoup d’attention le modèle de participations partagées de Kindred Capital en Angleterre.
Quelle est l’évolution la plus importante dans le capital-risque ?
Je n’ai pas un profil de pur financier, je viens du monde du cinéma, et je trouve qu’il existe un parallèle assez marquant entre ces deux écosystèmes, au demeurant très différents. La relation entre un entrepreneur et un investisseur se rapproche de la relation entre un réalisateur et un producteur. Le réalisateur est le créateur du projet, celui qui porte la vision, comme l’entrepreneur. Le producteur est celui qui va faire le pari de pousser un projet et de prendre les risques financiers associés, comme l’investisseur. Dans le cinéma, on a connu un avant et un après la Nouvelle Vague à la fin des années 60. Ce courant artistique a apporté un changement fondamental dans la relation réalisateur/ producteur. Après plusieurs décennies aux mains des producteurs, le « final cut » a basculé dans les mains des réalisateurs. Si les producteurs ont un rôle fondamental de « conseiller », c’est maintenant le réalisateur qui fait le choix final. Je crois qu’on est dans ce momentum dans l’investissement startup.
Quelles sont les performances de Newfund?