Big data, analytics, recrutement prédictif… Ces mots font désormais partie du vocabulaire des recruteurs. Pour une raison simple : leur métier est train de changer. Toute la partie sourcing, qui consiste à identifier les talents et gérer des CVthèques, peut être automatisée. Mais attention ! Selon Saad Zniber, co-fondateur de Yatedo, les modèles prédictifs ou les usages RH des Big Data sont loin d’avoir révéler tout leur potentiel. En effet, ils reposent encore trop sur la subjectivité humaine pour être réellement pertinents.Afin d’éviter ces écueils et améliorer les pratiques, Saad Zniber préfère parler d’intelligence artificielle.
Dans le travail de tout recruteur, il y a incontestablement une partie très rébarbative. Lorsqu’on recherche un profil, il faut diffuser une offre d’emploi puis trier les candidatures et enfin contacter les profils retenus. Ces processus peuvent être automatisés et gérés beaucoup plus efficacement par une intelligence artificielle. Non seulement le recruteur gagne du temps, mais il gagne aussi en qualité !
Le sourcing est un processus critique. S’il est raté, la valeur ajoutée du recruteur devient nulle. Aujourd’hui, il est donc préférable de confier le sourcing à des algorithmes. Pourquoi ? Car même chez les recruteurs les plus expérimentés, qui ont constitué au fil des ans un carnet d’adresses impressionnant, leur performance en sourcing n’arrive pas à la cheville des capacités d’une intelligence artificielle. En effet, quand un bon recruteur active un réseau susceptible de toucher plusieurs milliers de candidats, l’outil gère lui des dizaines de millions de profils. Pour autant, la quantité est-elle forcément synonyme de qualité ? Si on utilise le bon outil avec le bon modèle, alors oui !
Choisir le bon modèle de recrutement prédictif
Car c’est un peu ça le problème… Les apôtres du recrutement prédictif utilisent des modèles assez douteux. En gros, voici leur pitch : « pour trouver le talent dont votre entreprise a besoin, nous allons établir un profil idéal à partir du croisement de milliers de données internes et externes. Puis, nous allons rechercher et sélectionner des candidats qui matchent avec ce profil. » Autrement dit, ils ne font que répéter les bons vieux usages : « Dans mon entreprise, les diplômés HEC ont très bien réussi donc je ne vais recruter que des diplômés HEC. » Au final, la stratégie de recrutement est celle du clonage et des préjugés. Dans un monde qui évolue vite et où chaque entreprise peut se faire ubériser en l’espace de 6 mois, cette stratégie est vouée à l’échec !
Si le modèle du recrutement prédictif est séduisant intellectuellement (je recrute des profils identiques à ceux qui ont réussi dans mon entreprise), il est faux. Pourquoi ? Parce qu’il trouve son origine dans les préjugés des recruteurs (lesquels choisissent des critères selon leur propre expérience personnelle) et selon l’idée que les recettes d’hier vont fonctionner demain.
Une autre IA est possible
Une intelligence artificielle est une technologie pouvant raisonner comme un être humain. Pour en retirer de réels bénéfices, le recruteur doit se laisser guider par l’outil. Car c’est bien l’intelligence artificielle qui va lui fournir son profil idéal.
Prenons un exemple. Je souhaite recruter un responsable marketing. Je vais demander à mon outil d’intelligence artificielle d’identifier le profil le plus à même de réaliser ce job. Scannant des centaines de millions de données (disponibles sur le web, les réseaux sociaux…), l’outil analyse les parcours, les compétences et les diplômes de centaines de milliers de responsables marketing (mais aussi d’autres professionnels du marketing dont les titres sont différents mais les missions relativement semblables). Suite à cette analyse, l’outil va définir ce qui constitue l’essence d’un responsable marketing : il a telles compétences, il a connu tel parcours professionnel, il a fait ce type d’études,…
Grâce à ces informations, je visualise nettement à quoi ressemble la perle rare. Il faut maintenant affiner ce profil en fonction de certains critères qui me sont propres. Par exemple, je souhaite que le candidat évolue dans telle région ou dispose d’une certification Y. Egalement, je cherche quelqu’un ayant un fort potentiel (donc une personne qui a connu une évolution de carrière rapide) et plutôt passionné (donc une personne menant des projets en dehors de son travail pour acquérir de nouvelles compétences). Ce travail d’affinage permet alors d’établir une short-list de candidats réellement pertinente.
Adapt or die
D’ici à 5 ans, le métier de recruteur va radicalement se transformer. Toute la partie sourcing a vocation à être complètement automatisée. Même la prise de rendez-vous avec les candidats sera à terme gérée par l’intelligence artificielle. Ces fameux chatbots, dont on parle tant actuellement pour les plateformes e-commerce, seront chargés d’enclencher les premiers échanges avec les candidats. Dans le même temps, le tri des CV et l’animation de la CVthèque sera optimisée par les outils, permettant au recruteur de se libérer des tâches administratives et donc de se concentrer sur deux missions prioritaires : faire passer des entretiens d’embauche et prendre la décision finale !
L’expert
Saad Zniber est le co-fondateur de Yatedo,une start-up française qui travaille avec des cabinets de recrutement et de conseil, des SSII, des PME et des grandes entreprises telles que Colas. Yatedo est un moteur de recherche sémantique de personnes et Yatedo Talent est une solution de recrutement en Saas.