Si la longue traîne a quitté les hot trend Google depuis l’article de Chris Anderson dans Wired en 2004, la courbe de recherche sur ce mot clé semble suivre une pente ascendante depuis quelques années. Serait-ce dû à une certaine latence nécessaire à la prise de conscience d’un phénomène à la portée jusqu’alors incomprise ?
“The biggest money is in the smallest sales.” Kevin Laws
Que nous apprend la longue traîne ? Principalement deux choses :
Premièrement, que si vous enlevez les contraintes physiques, vous pouvez présenter plus d’articles sur vos « étagères ». Assez évident et peu instructif, surtout si l’on compare cette assertion avec ce que l’on peut entendre en école de commerce : « le choix affaiblit la décision d’achat ».
Deuxièmement, que le marché de ce qui pourrait être offert peut être plus grand que le marché existant. Et cela change à peu près tout ce que nous savions !
Pour comprendre, cette citation de Chris Anderson parle d’elle-même: « le marché des livres qui ne sont pas vendus en librairie est plus grand que le marché de ceux qui y sont ».
Alors que la tendance est à l’optimisation de la vente de chaque produit, la longue traîne invite à augmenter le nombre de produits à la vente.
Pourquoi les startups doivent-elles optimiser la longue traîne ?
Comprendre et appliquer la longue traîne sur un marché peut être (très) rentable. Mais cela encourage aussi la créativité et la diversité. Les contraintes physiques dans la distribution ont conduit à la rareté dans le choix. Comme nous sommes motivés par l’économie, les biens disponibles sont basés sur une stratégie d’intérêt commun. La distribution tente de trouver le plus grand public d’acheteurs, indépendamment de la « quantité d’intérêt individuel ». Cela conduit à des blockbusters et autres hits fades et sans caractère…
« Beaucoup de nos suppositions sur le goût populaire sont en fait des artefacts d’un mauvais matching entre l’offre et la demande – une réponse du marché à une distribution inefficace. » Chris Anderson
En d’autres termes, ce que nous savons de l’évolution des goûts des individus – qui tend à l’uniformité – pourrait simplement être le résultat d’un biais de marché.
La distribution en ligne et la vente au détail sont en train de tuer l’Ancien Monde de la rareté en ouvrant un monde d’abondance. En effet, lorsque l’ajout d’un article n’entraine pas de coût supplémentaire, vous pouvez donner accès à tout. Si cela accroît la diversité, cela pose tout de même la question du choix. Dans le monde de la rareté, la question se posait ainsi « Comment trouver ce que je cherche ». Dans le monde de l’abondance, elle devient « Comment savoir ce que je veux ».
Un client n’est pas un agent économique omniscient. Dans cette toute nouvelle disponibilité, il faut lui présenter ce qu’il désire. Mais comment ?! Voilà toute la complexité de la longue traine : comment présenter à l’utilisateur ce qu’il veut sans retomber dans l’uniformité du plus grand commun intérêt.
Comment les acteurs mettent-ils en place la longue traîne ?
Amazon : Rendre n’importe quel livre accessible à toute personne disposant d’une connexion Internet. Solution, 35% de leur chiffre d’affaires est généré par le désormais familier, « les clients qui ont acheté cet article ont également acheté … »
Ebay : Offrir à tous la possibilité de vendre n’importe quoi à n’importe qui, n’importe où.
Netflix : Proposer le plus grand catalogue de vidéos. Netflix donne accès à des genres et sous-genres qui sont négligés par les chaînes de DVD traditionnelles : films étrangers, anime, films indépendants, séries télévisées britanniques, vieilles télévisions américaines, films Bollywoodiens, documentaires, etc. 20% des locations Netflix sont en dehors de ses 3 000 meilleurs titres.
Uber : Donner aux gens l’accès à un conducteur privé à un coût inférieur à celui des taxis. En 2015, 4 ans après la première course Uber, le marché des taxis à San Francisco est d’environ 140 millions de dollars par an alors qu’Uber gagne 500 millions de dollars par an.
Google : Proposer à chaque entreprise une solution publicitaire simple, efficace et ciblée. Ils ont appris que les business de niche ont autant besoin de publicité, sinon plus, que les grandes entreprises.
Crowdfounding : Peut-être vu comme une «longue traine financière» où chacun peut financer son petit projet individuel.
SEO : La longue traîne est aujourd’hui cruciale dans toute bonne stratégie de référencement. L’expression complexe avec seulement des dizaines de recherches mensuelles représente 70% des recherches. De plus: une expression plus ciblée et précise apportera du trafic plus qualifié et fera chuter votre taux de rebond.
Medium : Enfin, Medium paye les auteurs pour les « claps » qu’ils obtiennent. Où est la longue traine ici ? C’est subtil, mais elle réside dans la possibilité pour le lecteur de donner zéro, un ou cinquante claps. Ce système permet à une base de fans très étroite de donner beaucoup d’applaudissements – d’intérêt – à un bon article même s’il est lu par peu de personnes. Ce n’est pas encore la solution idéale, mais c’est une nette amélioration face aux « likes » qui ne font qu’enorgueillir les contenus à grande audience au détriment des contenus de qualité.
La niche, la solution ultime pour les startups ?
La première leçon que l’on peut retenir en considérant la longue traine est de se focaliser sur les niches.
Il n’y a pas de recette magique pour appliquer la longue traîne à votre entreprise, car elle doit être personnalisée dans le contexte de ses contraintes.
Pourtant, vous pouvez suivre ces 3 principes:
1- Comprenez les goûts de vos utilisateurs et aidez-les à découvrir ce qu’ils veulent
2- Pensez localement
3- Renforcez les créateurs de valeur de qualité
Dans une économie de longue traine, il est plus coûteux d’évaluer que de faire. Tiens donc, l’exécution avant la stratégie… Lancez-vous !
